Boucherie Dynamique, l'entreprise du mois
Boucherie Dynamique, l'entreprise du mois

« Mon fils, tu seras boucher… »

Recalé au BEPC en classe de troisième, Alain Charron ne se doutait alors pas que son père venait de le déposer sur la voie de la réussite… En apprentissage chez un voisin boucher dans sa région natale du Mans, Alain Charron va petit à petit apprendre à apprécier le travail, qui lui avoue encore que son père l’y avait presque inscrit de force ! Après 3 ans et l’obtention du CAP, l’élève est devenu prometteur et poursuit ses classes à Paris dans une boucherie haut de gamme qu’il qualifie de « boucherie de la viande ».  C’est là et à l’issue de son brevet professionnel qu’il est repéré par la grande distribution, avec laquelle il va travailler et surtout apprendre à Melun pendant six ans.

 

« Pendant mon apprentissage, j’ai appris à travailler. Dans la grande distribution, j’ai appris à compter »

Fort d’une solide formation de boucher et d’une expérience enrichissante en grande distribution, Alain Charron franchit le pas en 1982 : il rachète une boucherie de quartier de 30m² à Chartres. Dès lors c’est le début d’une grande réussite, qui le mène aujourd’hui à la tête de deux magasins (dont un de 500m²), traitant plus de 1000t de viande et réalisant un chiffre d’affaires de plus de 6 millions d’euros.

 

La recette du succès : l’innovation bien sûr !

L’innovation : voilà un terme qui colle à la peau d’Alain Charron tant il occupe une place importante dans la réussite de son entreprise. En Agro-Alimentaire l’innovation n’est pas toujours technologique : l’approche de la production et de la clientèle, le marketing, tels ont été les points forts de l’activité d’Alain Charron.

 

« Vendre du budget plus que de la viande »

Riche de son expérience en grande distribution, Alain Charron associe à son métier de boucher traditionnel une vision économique de son produit très pointue et surtout très efficace. « Les familles ont un salaire mensuel, et elles doivent souvent rembourser la maison, la voiture, habiller les enfants, etc. Les clients ont donc un budget pour l’alimentaire : il suffit de leur proposer une offre à la hauteur de leur budget. » C’est là toute l’intelligence d’un concept qui tire tous les chiffres de vente de la Boucherie Dynamique vers le haut : les colis. Ces colis proposés par Alain Charron permettent de nourrir en viande une famille de 4 à 5 personnes pour un mois, et surtout pour moins de 100€ ! Composés de pièces de viande de consommation courante (steaks, côtes de porc, escalopes de dinde…), ces colis se vendent comme des petits pains : plus de 200 achetés par jour ! Ce concept est le fruit d’une vision globale développée par Alain Charron après son passage en grande distribution : « Les clients ne maîtrisent pas toujours l’aspect « prix au kilo » de la viande.

Ils ne savent pas toujours quel sera le juste poids de viande, et surtout de mieux se rendre compte de ce que lui coûte le produit ». Maîtrise parfaite du métier, du marché et connaissance des clients : les ingrédients sont simples, et la recette est redoutablement efficace. Dernière application en date : la préparation interactive de buffets et barbecues en ligne, sur le site internet de la Boucherie Dynamique. « A l’occasion d’un barbecue, vous aimez vous réunir entre mais vous n’avez pas forcément les moyens d’inviter 20 personnes » Qu’à cela ne tienne, la Boucherie Dynamique travaille pour vous : vous renseignez le nombre de convives et les produits désirés (viande bien sûr, mais aussi produits de salaison pour l’apéritif et l’entrée, et de multiples salades composées pour accompagner le repas). Le site vous permet alors de commander en direct, et de ramener le prix global à un prix par personne. Mieux, il vous renseigne sur la portion de viande prévue pour chaque invité : « Bien souvent en appétit lors de la commande, le client a tendance à acheter beaucoup trop de viande. Le site permet de maîtriser la portion destinée à un invité : si en fin de commande vous arrivez à 600 grammes de viande par invité, vous pouvez anticiper et réduire un peu les volumes pour retrouver une portion raisonnable, et ainsi éviter les surplus » Maîtrise de ses produits, approche « par portion », connaissance du client… toujours !

 

La proximité, une innovation qui ne date pas d’hier !

Bloqué sur la route du retour de Paris et rageant après un livreur qui bloquait la voie, Alain Charron voit une nouvelle fois l’innovation frapper à sa porte. Pourquoi ne pas calquer le travail de boucher sur celui d’une entreprise livrant des surgelés ? En soit rien de nouveau me direz-vous : « Je n’ai fait que reprendre le métier traditionnel du boucher qui allait, avec son camion, livrer plusieurs communes… ». À y regarder de plus près, le métier a quand même évolué ! Livrant dans huit départements à 100km à la ronde, le travail de la Boucherie Dynamique est en effet plus proche de celui des livreurs de surgelés. Les commandes des clients sont enregistrées par les commerciaux ou livreurs, au magasin, par fax, et désormais par Internet. Après préparation au magasin de Chartres, la flotte dessert ses clients en viande fraîche à l’occasion de tournées maîtrisées au kilomètre et à la minute près. Un client livré toutes les huit minutes pour un chiffre d’affaires de plus de 2 millions d’euros, la livraison à domicile fait fureur. Et là encore la recette miracle a été appliquée : une maîtrise parfaite des coûts de production et de livraison, la connaissance des données sociologiques des différentes zones de livraison pour optimiser les tournées… simple mais efficace !

 

Redorer le blason de la profession

Alain Charron réussit, et il veut que ça se sache : « il faut dépoussiérer l’image du boucher bedonnant, avec du steak haché sous les ongles et qui trime pour survivre. Je veux montrer aux gens que le métier de boucher peut rapporter de l’argent. » Cette philosophie, il la développe au quotidien et transmet le message à l’occasion de ses multiples interventions : Chambre de Métiers et de l’Artisanat, interventions dans les collèges et lycées… le blason du métier de boucher doit être redoré, et la profession doit à nouveau faire rêver les jeunes. Souvent découragés par des conditions de travail réputées difficiles, les jeunes peuvent trouver en sa réussite une réelle source de motivation. Et il n’y a qu’à présenter ses chiffres d’activité pour convaincre : une croissance quasi-exponentielle du chiffre d’affaires (de 300k€ en 1982 à 6,2M€ en 2006), plus de 5000 clients fidèles… Le dernier symbole en date est en cours de construction : un bâtiment de 2000m² devrait ouvrir ses portes courant octobre 2007. Il accueillera la production, l’administration de l’entreprise, des quais de livraison et une nouvelle surface de vente directe de près de 300m². Coût de l’opération 3 millions d’euros, avec en ligne de mire le recrutement d’une vingtaine d’employés, un objectif de 500 clients par jour et un chiffre d’affaires espéré de 10 millions d’euros en 2010. Dynamique, la boucherie…

 

Concurrencer la grande distribution

Quel est aujourd’hui le plus grand plaisir d’Alain Charron ? « Voir le samedi mes clients acheter leur viande pour le mois. Comme c’est un peu lourd, mes bouchers vont porter le colis dans le coffre des clients. Mon plaisir, c’est de voir le coffret ouvert, rempli de sacs de la grande surface voisine. Les gens font leurs courses, mais ils pensent à nous pour la viande. Là, on a gagné… » S’inspirant des spécialistes qui vendent vêtements, tapis ou pièces auto, Alain Charron sait qu’il y a de la place pour faire du chiffre à côté des généralistes que sont les grandes surfaces. « Les gens font l’effort d’aller acheter leurs vêtements chez une enseigne spécialisée, alors qu’il y a bien des vêtements en grande surface. En insistant sur la qualité, la proximité, et la connaissance de la clientèle tout en restant compétitifs au niveau des prix, nous nous présentons comme des spécialistes de la viande, nous démarquant du commerce en grandes surfaces. »

 

La Boucherie Dynamique en chiffres

1982 : ouverture de la première Boucherie Dynamique à Chartres (28) – CA : 300k€

1985 : ouverture d’un deuxième magasin à Lucé (28) – CA : 1,4M€ en 1986

1994 : Le CA stagne (2,3M€) et Alain Charron décide de revendre son magasin de Chartres. Il fait construire des bâtiments de 500m² pour la production et la vente directe : le CA repart.

1996 : La crise de la vache folle plombe l’industrie de la viande, mais pas la Boucherie Dynamique qui passe les 3M€ de CA (3,2M€)

2000 : Le CA dépasse 5M€

2007 : L’espace de production de 500m² sera abandonné en fin d’année pour des locaux flambant neufs de 2000m² - CA : 6,2M€ pour 2006. La vente à domicile bat son plein (plus de 2M€ de chiffre d’affaires) et les magasins se portent toujours aussi bien (2,6M€ à Chartres et 1,4M€ à Lucé). Plus de 1000t de viande traitées par an.

2010 : Objectif 10M€ de CA et 500 clients/jour

 

 

F. Chartier, Hyginov - 2007